• Plage Bonaparte à Plouha (Côtes d'Armor) - Haut-lieu de la Résistance

  • Sacy-le-Grand (Oise) - Mémorial en souvenir du F/O H. H. MacKenzie (RCAF)

  • Supermarine LF Mk.Vb Spitfire EP120 - G-LFVB - (The Fighter Collection)

  • Le Cardonnois (Somme) - Stèle à la mémoire de l'équipage du Boeing B-17 #42-31325, 452nd Bomb Group

  • B-17G-85-VE 44-8846 - F-AZDX - (FTV)

 

10 mai 1944

 

Martin B-26 “Marauder” # 42-96058

 

394th Bomb Group

585th Bomb Squadron

9th Air Force

 

Léglantiers (Oise)

 

 

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     Le B-26 “Marauder” # 42-96058 appartenait au 394th Bomb Group, 585th Bomb Squadron de la 9th Air Force, également appelé les “Bridge Busters”, basé à Boreham, dans l’Essex, en Angleterre. Le 394th Bomb Group participait à la préparation du futur Débarquement en Normandie en frappant ponts, gares de triage, aérodromes et sites d’armes V.

     L'équipage du B-26 # 42-96058 : 

Capt James A. JOY Pilote Prisonnier Edinburg, Texas
2nd Lt John O. JOHNSON Copilote Prisonnier Oklahoma
Sgt William L. EDGE Navigateur/Bombardier Evadé puis prisonnier Tuscaloosa, Alabama
S/Sgt Harold J. MAYNARD Mécanicien Prisonnier Racine, Wisconsin
S/Sgt Louis I. WATTS Opérateur-radio Evadé Little Rock, Arkansas
Pvt Joseph J. HOULIHAN Mitrailleur de queue Evadé Philadelphie, Pennsylvanie

                                                                      

Equipage

Au premier rang à droite : le S/Sgt Louis I. Watts. A gauche : le Pvt Joseph J. Houlihan 

     Le 10 mai 1944, le 394th Bomb Group s’apprêtait à réaliser sa 33e mission en territoire occupé avec pour cible les installations ferroviaires de Creil. Ce bombardement s’inscrivait dans le cadre de l’opération “Desert Rail”qui consistait à anéantir toutes les voies ferrées conduisant aux côtes de la mer du Nord, de la Manche et de l’Atlantique avec pour finalité de paralyser le système de transport allemand. Véritable nœud ferroviaire, Creil était un objectif hautement stratégique pour les Alliés. Creil se trouvait aussi à proximité de Saint-Leu d’Esserent où étaient assemblées les bombes volantes V1. L’objectif de la mission du 10 mai était d’anéantir le dépôt de locomotives, le triage et la rotonde.

     Pour y parvenir, 39 B-26 accompagnés de “Pathfinders “ (appareils-éclaireurs) furent déployés en six ”boxes” (formations). Ayant décollé à 7h00 de Boreham, ils atteignirent vers 10h30 leur objectif et déversèrent, par vagues successives, près de 62 tonnes de bombes. Le résultat fut considéré comme excellent par le commandement. Il constitua, selon le Général de Brigade Samuel E. Anderson, “un grand pas en avant dans la campagne actuelle visant à entraver le mouvement de troupes ennemis et du matériel militaire”. Le dépôt de locomotives fut détruit à 70% et la rotonde était hors d’usage. Ce bombardement provoqua toutefois d’importantes destructions collatérales sur les quartiers environnants. Les pertes civiles furent importantes, 74 morts et plus d’une centaine de blessés, principalement liées à la présence en gare d’un train de voyageurs. Le rapport de la Chambre de Commerce et d’Industrie du mois de mai nota que “Creil sera bientôt une ville morte, la gare de triage est détruite, le dépôt de locomotives est rasé, la gare a disparu, de nombreux habitants se sont réfugiés ailleurs”.

Creil10mai1944

 La gare de Creil après le bombardement du 10 mai 1944.

     Lors de ce raid, le 394th BG subissait toutefois la perte d’un équipage. La défense anti-aérienne allemande, la Flak, parvint à toucher le “Marauder” # 42-96058 piloté par le Capitaine James A. Joy. Ce dernier mais aussi son copilote, le 2nd Lt John O. Johnson et le mécanicien S/Sgt Harold J. Maynard furent blessés. L’appareil frappé dans sa partie frontale devint vite hors de contrôle. De la fumée s’échappait du moteur droit, les instruments de bord, la radio et le système hydraulique ne répondaient plus. Les interphones rendus inopérants compliquèrent la communication entre les membres de l’équipage. Les six hommes à bord n’eurent d’autres choix que de s’extraire de l’appareil à 9 000 pieds. Le B-26, livré à lui-même, perdit progressivement de l’altitude, décrivit un large cercle et finit par s’écraser et exploser, vers 10h30, à 500 mètres au sud-est du village de Léglantiers (Oise).

vueaerienne

Léglantiers - Le lieu du crash

     Au sol, les six hommes furent immédiatement activement recherchés. Dès lors, l’alerte était donnée à la Police Militaire allemande de Montdidier et de Compiègne. Vers 11h30, le Capitaine Joy, le 2nd Lt Johnson et le S/Sgt Maynard, blessés et dans l’impossibilité de prendre la fuite, étaient capturés vraisemblablement près du village de La Neuville-Roy. L’opérateur-radio S/Sgt Louis I. Watts, le navigateur/bombardier Sgt William L. Edge et le mitrailleur arrière le soldat Joseph J. Houlihan atterrirent près du village de Ravenel. Des Français arrivèrent rapidement pour porter secours aux trois aviateurs qui échappèrent ainsi aux recherches allemandes.

      LouisIWatts
                    S/Sgt Louis I. Watts
 
HOULIHAN
Pvt Joseph J. Houlihan

 

Edge
Sgt William L. Edge

     Le Capitaine Joy et son copilote Johnson furent quant à eux dirigés vers l’hôpital militaire allemand de Beauvais puis, tout comme le mécanicien Maynard, vers des camps de prisonniers allemands.

     Les circonstances précises de l’immédiate prise en charge des aviateurs Watts, Houlihan et Edge après leurs atterrissages restent à ce jour méconnues. Du 10 au 12 mai, Joseph Houlihan suivit un itinéraire différent de celui de Louis Watts et William Edge. Ces derniers trouvèrent refuge, dans l’intervalle, à Saint-Just-en-Chaussée, fief d’un important détachement de Résistance. Ils furent tous deux hébergés par Jean Crouet, âgé de 41 ans et ingénieur-chimiste. Ce dernier déclara les avoir reçus du Docteur Edmond Caillard, personnage notoire de la résistance locale, connu pour son implication au service des aviateurs alliés tombés dans la région (il vint en aide à 87 d’entre eux). À bord de sa Simca et muni d’une autorisation de circuler, le Docteur Caillard apparut une nouvelle fois comme l’homme providentiel chargé de récupérer les aviateurs en fuite et d’organiser leurs hébergements. Louis Watts et William Edge ne séjournèrent qu’une nuit ou deux chez Jean Crouet avant d’être transférés vers une autre destination.

EdmondCaillard        Jean Crouet

                                                              Le Dr Edmond Caillard                                  Jean et Madeleine Crouet

     La présence des trois aviateurs à Saint-Just-en-Chaussée fut communiquée à Georges Jauneau, alias “Capitaine Jacques”, membre de l’Etat-Major F.F.I de l’Oise. En mai 1944, il s’apprêtait à prendre le commandement des troupes FFI et FTP du secteur Centre-Nord de l’Oise (environ 2 000 hommes). Georges Jauneau résidait également Saint-Just-en-Chaussée où était établi le détachement FTP “Jacques Bonhomme” (environ 200 hommes). C’était désormais sous sa responsabilité que les trois aviateurs allaient être dirigés vers un réseau d’évasion. Le 12 mai, les trois fugitifs furent conduits par son bras droit, Marc Cuny, vers la commune de Froissy. Marc Cuny, réfractaire, était recherché par la Gestapo. Il participait activement aux nombreux coups de main du détachement “Jacques Bonhomme” (sabotages sur le matériel ferroviaire, transports d’armes et de journaux clandestins, attaques de convois...) Toujours volontaire pour les missions dangereuses, il convoya des aviateurs alliés recueillis dans la région, n’hésitant pas si besoin à forcer les barrages allemands. À plusieurs reprises, il prit en charge le transport de Louis Watts, Joseph Houlihan et William Edge.

     Froissy constituait la réserve du détachement “Jacques Bonhomme” avec pour chef de groupe Jean Louvet. Eugène Ropital et Jean Boisselin, entrèrent en Résistance en novembre 1943. Tous deux assurèrent pendant trois semaines l’hébergement des aviateurs. Ils leur redonnèrent un semblant de stabilité après les deux jours mouvementés qu’ils venaient de passer après le crash de leur appareil.

     Louis Watts et Joseph Houlihan furent pris en charge par Juliette et Eugène Ropital. Agé de 56 ans, Eugène Ropital exerçait le métier de bourrelier-sellier. À compter de ce jour, Watts et Houlihan allaient suivre le même itinéraire jusqu’à la Libération. William Edge était quant à lui confié à Marguerite et Jean Boisselin. Ce dernier, âgé également de 56 ans, était “marchand de nouveautés”. Pendant trois semaines, Eugène Ropital et Jean Boisselin mirent tout en œuvre pour garantir l’hospitalité de leurs hôtes alliés qui, de surcroît, avaient l’âge de leurs propres enfants. De cette improbable rencontre naquirent des amitiés immortalisées par une série de photos prises dans la cour de Jean Boisselin.

     Les risques étaient grands pour tous ceux qui hébergeaient des aviateurs alliés. Pourtant il n’était pas rare de voir des Allemands entrer dans le commerce de Jean Boisselin, l’ennemi ignorant qu’il logeait un aviateur dans la pièce contigüe. Sa cave servait aussi de refuge en cas d’urgence.

Froissy
 Chez Jean Boisselin à Froissy.
Au premier rang, de gauche à droite : Joseph Houlihan, Louis Watts, William Edge.

Au second rang, de gauche à droite : Eugène Ropital, X, Jean Boisselin

 

     Après 21 jours de vie commune, Louis Watts, Joseph Houlihan et William Edge durent cependant quitter précipitamment leurs familles d’accueil respectives. Début juin, les Allemands commencèrent à réquisitionner certaines maisons du bourg pour y loger leurs officiers et hommes de troupe. En conséquence, le 3 juin, les trois aviateurs quittèrent précipitamment leurs hébergeurs. De nouveau, Marc Cuny les convoya à Saint Just-en-Chaussée où ils furent placés chez Yvonne Fossier.

     Bien que les trois aviateurs ne fussent plus sous sa responsabilité, Jean Boisselin continua à se tenir informé sur leurs parcours pendant les semaines qui suivirent leur départ. Il poursuivit parallèlement la lutte en participant à la récupération de cartes d’alimentation au profit des réfractaires. Eugène Ropital fut quant à lui de nouveau à ses côtés quand arriva l’heure des combats de la Libération particulièrement violents sur cette localité. Peu de temps après, Eugène Ropital était nommé Président du Comité Local de Libération de Froissy.

     Louis Watts, Joseph Houlihan et William Edge furent conduits chez Yvonne Fossier, âgée de 26 ans et demeurant rue de Paris à Saint Just-en-Chaussée. Yvonne Fossier était en connexion avec les membres du détachement “Jacques Bonhomme”. Elle avait précédemment hébergé, au cours du mois de janvier, quatre autres aviateurs américains pendant plusieurs jours. Louis Watts et Joseph Houlihan séjournèrent une semaine chez elle avant d’être convoyés par Marc Cuny à Wavignies. William Edge resta chez Yvonne Fossier jusqu’au 3 juillet.

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Début juin 1944 à Saint Just-en-Chaussée au domicile de Paul Bègue et d'Yvonne Fossier.

De gauche à droite : Lucien Bertin, Joseph Houlihan, Yvonne Fossier, Louis Watts, Suzanne Lequien, William Edge.  

     Le départ de William Edge fut par la suite précipité par les tragiques mesures répressives allemandes qui frappèrent Saint-Just-en-Chaussée et ses environs. Depuis le Débarquement allié en Normandie, la Résistance intensifiait ses actions, suscitant l’inquiétude des forces d’occupation. Celles-ci renforcèrent en conséquence les contrôles de population, entrainant des fouilles et des arrestations. Le 3 juillet au petit matin, une vague d’arrestations s’abattit sur Saint-Just-en-Chaussée. La rafle était d’envergure. La Gestapo et la Feldgendarmerie cernèrent le bas de la rue de Paris. Une quinzaine de patriotes furent arrêtés. Marc Cuny et Georges Jauneau échappèrent in extremis à l’occupant après une chasse à l’homme de plusieurs heures. Les Allemands investissaient également le logement d’Yvonne Fossier. Son compagnon Paul Bègue, lui-même recherché en tant que réfractaire, eut la présence d’esprit de s’enfermer avec William Edge dans un clapier. Ils y restèrent pendant deux heures suspendus avec “la mitraillette des Boches leur passant entre les jambes”. Suzanne Lequien, amie et voisine d’Yvonne Fossier, n’ignorait pas la présence de William Edge chez cette dernière. Face à cette situation précaire, elle décida d’apporter son aide alors que les Allemands sillonnaient en tout sens le quartier.

     Dans ce que Georges Jauneau qualifia d’acte “d’une audace et d’un courage magnifiques”, elle se présenta chez Yvonne Fossier et réussit à extraire William Edge de la souricière en le cachant au fond d’un landau. La petite fille d’Yvonne, Paulette, qui n’était âgée que de quelques mois, fut placée au dessus. Suzanne Lequien transporta ainsi William Edge en lieu sûr, au nez et à la barbe de l’ennemi, jusqu’au domicile d’Irène Bourgoin, sœur de Paul Bègue. Suspectée, Yvonne Fossier fut plus tard interrogée par les Allemands. Son domicile fut fouillé de fond en comble à la recherche de Paul Bègue qui, entre-temps, était parvenu à s’échapper.

     Les patriotes arrêtés lors de cette rafle de grande envergure furent incarcérés à la prison de Compiègne puis au camp de Royallieu. La majorité d’entre eux sera déportée le 17 août vers le camp de concentration de Buchenwald. Le domicile rue de Paris de Georges Jauneau, qui parvint à échapper de justesse à l’arrestation, fut pillé par les Allemands qui emportèrent aussi sa voiture.

     Après sa périlleuse exfiltration vers le domicile d’Irène Bourgoin, le 6 juillet William Edge se rendit péniblement à bicyclette chez Jean Boisselin à Froissy. Il n’y resta que quelques heures avant d’être conduit à moto par Robert Moulet dans le village de Beauvoir.

     Robert Moulet, marchand de bestiaux à Caply, décida de placer William Edge chez Henri Ménard, un ouvrier agricole père de 8 enfants. Le même jour, arrivait aussi chez lui le pilote de chasse Harry Hunter. Depuis le 1er juin, Henri Ménard hébergeait déjà un aviateur australien, Mervyn Fairclough. Faute d’espace suffisant en raison de sa famille nombreuse, il confia William Edge et Harry Hunter à son beau-père, Joseph Le Mouel, qui habitait à quelques centaines de mètres. Les deux aviateurs y séjournèrent jusqu'au 28 juillet...

 

     Le 7 juin 1944, Louis Watts et Joseph Houlihan, convoyés par Marc Cuny, se trouvaient désormais à Wavignies, petite bourgade agricole de 650 habitants. Deux événements majeurs avaient dernièrement marqué durablement cette localité : en janvier, la Résistance avait détruit quatre cuves de 200 000 litres d’alcool destinés aux Allemands provoquant un gigantesque incendie, puis en février, une Forteresse volante du 306th Bomb Group s’était abattue aux abords de la commune. La lutte s’inscrivait également en son sein où un groupe de Résistance s’était depuis longtemps constitué, essentiellement autour de deux hommes charismatiques : Jean Dupuy et Henri Vincenot.

     Résistant de la première heure, Jean Dupuy entra en résistance dès 1941. Instituteur à l’école de Wavignies, il fit partie de ces enseignants qui contribuèrent à l’implantation du Front National dans l’Oise aux côtés d’Edmond Léveillé. Il fut promu chef du groupe de Wavignies en mars 1942, puis sous-chef du secteur de Saint-Just-en-Chaussée en mai 1943 au sein du détachement “Jacques Bonhomme. En juin 1944, il poursuivit son ascension en intégrant l’Etat-Major départemental FFI avec le grade de Capitaine.

Henri Vincenot     Le parcours d’Henri Vincenot était empreint du même engagement. Gardien du château depuis fin 1941, Henri, alias “Gustave”, entra en Résistance par l’intermédiaire de son ami Jean Dupuy qui l’introduisit auprès de Georges Jauneau au début de l’année 1943. Dès lors, “son grand courage et son aptitude au commandement” lui firent rapidement gravir les échelons. Dans le sillage de Jean Dupuy, il devint à son tour Chef de groupe à Wavignies puis Chef du maquis de Catillon-Fumechon. En mars 1944, lors du rattachement du détachement à l’Etat-Major FFI, “Gustave” fut nommé Lieutenant et prit en charge le commandement des groupes de Wavignies, Ansauvillers, Gannes et Catillon-Fumechon.

     Jean Dupuy et Henri Vincenot étaient à l’origine de nombreux “coups de main” tels que : déraillements, sabotages de lignes électriques, attaques de convois allemands et réceptions de parachutages d’armes. Les réunions du groupe étaient organisées au château qui, bien que réquisitionné par les Allemands, restait inoccupé. Des armes étaient également dissimulées dans la propriété. Outre les actions directes contre l’occupant, le groupe vint également en aide aux jeunes gens en situation irrégulière, aux résistants en difficulté ainsi qu’aux aviateurs alliés tombés dans la région, en leur fournissant habits civils, hébergements et faux papiers. Plusieurs expéditions furent menées par Henri Vincenot à l’encontre de mairies pour s’emparer de tickets d’alimentation en vue d’assurer l’approvisionnement de ces hommes et du groupe. Bon nombre d’aviateurs furent hébergés par les époux Vincenot au sein même du château. Pour ce faire, Henri Vincenot était secondé par sa femme Yvonne qui ne ménagea pas ses efforts pour leur venir en aide. Wavignies devint alors un centre d’hébergement reconnu, en connexion avec différentes filières d’évasion où convergèrent près d’une vingtaine d’aviateurs alliés. De cette attractivité se constitua un réseau d’helpers disséminés dans les fermes environnantes. Parmi eux, Antoinette Dhuyvetter chez qui Joseph Houlihan et Louis Watts étaient hébergés.

 

     Antoinette Dhuyvetter était âgée de 38 ans et habitait rue Mathias. Son mari Pierre, charpentier avant la mobilisation, était alors prisonnier deAntoinettedhuyvetter guerre en Allemagne depuis 1940. Jean Dupuy lui proposa alors d’héberger trois aviateurs américains : Louis Watts, Joseph Houlihan et le 1st Lt Harry F. Hunter (pilote de chasse dont le P-47 avait été abattu le 30 mai 1944). Antoinette accepta et reçut le 7 juin les trois hommes qu’elle prit en charge pendant trois semaines avec la complicité d’une amie, Josepha Socka. Le maire du village, Lucien Sueur, fournissait du ravitaillement et des vêtements. C’est dans cet intervalle que tous apprirent le déclenchement d’une opération militaire d’envergure sur les côtes normandes, le Débarquement. A la précarité de la situation se mêla alors l’immense espoir de la délivrance. Le 28 juin, Marc Cuny, accompagné d’Henri Vincenot, vint récupérer les trois hommes pour les transférer à Puits-la-Vallée.

     Cinq jours plus tard, comme à Saint-Just-en-Chaussée, les Allemands cernèrent la localité de Wavignies entre 4 et 5 heures du matin et procédèrent à des arrestations. Le château fut une cible prioritaire. Pressentant la menace, Henri Vincenot s’était réfugié depuis la veille dans une dépendance voisine de son domicile et sortit les armes à la main à l’arrivée des Allemands. Après avoir ouvert le feu sur l’ennemi, il fut appréhendé puis conduit devant sa maison où il fut exécuté sous les yeux de sa femme et de ses deux jeunes enfants. Pendant ce temps, Jean Dupuy était arrêté à son domicile tout comme le maire du village Lucien Sueur. Les Allemands n’ignoraient pas la présence d’aviateurs alliés recueillis dans la commune. Ils fouillèrent le château avec minutie et investirent un grand nombre d’habitations. Quatre aviateurs se retrouvèrent dans cette souricière. Le F/O Louis Greenburgh (RCAF) et le Sgt William Brown (RAF) étaient hébergés par Henri Réant, secrétaire de mairie, et sa femme Marie. Ces derniers, ayant entendu la fusillade en provenance du château, cachèrent immédiatement les deux aviateurs sous des fagots dans une grange. Ils ne furent pas découverts mais Henri Réant fut cependant arrêté. Les deux autres aviateurs britanniques, Fred Carey et Richard Woosnam, furent arrêtés chez Joseph Bugar et sa compagne Marie Dubzak alors qu’ils étaient cachés sous un tas de fumier. Au total, près d’une quinzaine de personnes fut arrêtée et regroupée au château. Antoinette Dhuyvetter ne fut pas inquiétée mais elle reconnut avoir eu très peur ce jour-là, d’après une lettre adressée après la guerre à Joseph Houlihan.

     A Wavignies, la plupart des résistants arrêtés furent ensuite incarcérés à la maison d’arrêt de Compiègne. Pendant plusieurs jours, ils furent soumis à de violents interrogatoires en vue d’obtenir des aveux. Ils ont été ensuite transférés au camp de transit de Royallieu d’où ils partirent le 17 août dans les tristement célèbres wagons “Hommes 40, Chevaux 8”. Ce jour-là, 1 250 hommes embarquèrent dans le dernier convoi de déportés de Royallieu à destination du camp de concentration de Buchenwald dans des conditions de transports épouvantables (wagons surchargés, soleil de plomb, absence d’air et d’eau). Tous n’en revinrent pas.

     Le 28 juin 1944, Joseph Houlihan, Louis Watts et Harry Hunter quittèrent Wavignies sous bonne escorte. Ils furent convoyés par Marc Cuny et Henri Vincenot à Puits-la-Vallée où les attendait le responsable de la Résistance locale, Paul Grénaud. Pour éviter les indiscrétions, il était convenu de déposer les trois Américains à l’orée d’un bois, à proximité du village. Paul Grénaud récupéra Louis Watts et Joseph Houlihan dans une carriole et les conduisit à son domicile. Le 1st Lt Hunter suivit une autre route. Jacques Naillon l’emmena chez lui, dans le hameau d’Hédencourt, près de Saint André-Farivillers. Cette décision changea la destinée d’Harry Hunter qui retrouva William Edge le 6 juillet à Beauvoir.

Circonstances de l'arrestation de William Edge

     En juillet 1944, les services de renseignement allemand préparaient une opération ayant pour but d’infiltrer les réseaux de Résistance de la région de Breteuil. Ils furent aidés dans cette tâche par deux Français passés au service de l’ennemi. Ces derniers, se faisant passer pour des résistants, gagnèrent la confiance de certains patriotes qui leur livrèrent de précieux renseignements et leur dévoilèrent la présence d’aviateurs alliés dans le secteur.

     Les deux faux-résistants prétextaient être en mesure de faire rapatrier les aviateurs par voie aérienne vers l’Angleterre. Pourtant de nature méfiante, Robert Moulet se laissa convaincre et tomba lui aussi dans le piège.

     Le 27 juillet, l’Australien Mervyn Fairclough et trois aviateurs anglais (Geoffrey Bennett, Philip Dowdeswell et Patrick Hegarty) furent conduits par Robert Moulet et son commis Guy Brillé à bord d’une vachère hippomobile jusque dans une grange du hameau de Warmaise, à mi-chemin entre Bonvillers et Chepoix. Au point de rendez-vous fixé, ils furent mis en présence des faux résistants. Peu de temps après, une automobile arriva avec deux hommes armés à bord (en fait des policiers allemands en civil). Ceux-ci emmenèrent les quatre aviateurs qui furent livrés à un groupe d’agents de la Gestapo quelques kilomètres plus loin.

     Le lendemain, 28 juillet dans l’après-midi, William Edge, Harry Hunter et un aviateur anglais, Peter Taylor, subissaient le même sort. Cette fois, c’est dans le bois des Moines, au sud de Bonvillers, qu’ils furent confiés sans aucune méfiance aux deux sinistres individus. Des agents de la Gestapo, arrivés dans le même véhicule que la veille, arrêtèrent peu après les trois aviateurs, sur la route menant à Ansauvillers.

     Le 29 juillet, les aviateurs australiens James Gwilliam, Eric Johnston, Keith Mills et Robert Mills, furent amenés à bord d’un véhicule à proximité de Chepoix. Guy Brillé prit ensuite le relais et les emmena à pied en direction de Breteuil. A l’endroit convenu, dans un bosquet, ils furent rejoints par Robert Moulet et les deux soi-disant résistants accompagnés cette fois d’un complice. Malheureusement, le même processus que les jours précédents se répéta. Un peu plus loin, la police allemande captura les quatre Australiens qui furent emmenés à Beauvais.

     Le 2 août, un nouveau rendez-vous avec les traitres était fixé à Tartigny. Ayant acquis entre temps la conviction qu’il avait été dupé, Robert Moulet ne s’y présenta pas et recommanda expressément à ses amis résistants de disparaitre du secteur. Malheureusement, certains refusèrent de le croire. Se sachant alors démasqués, les faux résistants déclenchèrent, dans la nuit du 2 au 3 août, une vague d’arrestations et de pillages épaulée par leurs complices et la police allemande dans les villages de Bacouël, Bonvillers, Chepoix et Tartigny. Vingt sympathisants de la Résistance furent arrêtés puis incarcérés à la caserne Agel de Beauvais où ils subirent, pour la plupart, de violents interrogatoires. Le 17 août, 16 d’entre eux étaient déportés depuis Compiègne vers le camp de concentration de Buchenwald, 10 n’en revinrent pas. Par chance, les familles Ménard et Le Mouel échappèrent à ces arrestations.

     Les 11 aviateurs arrêtés lors des journées des 27, 28 et 29 juillet furent emprisonnés à la caserne Agel de Beauvais où ils ont été brutalement interrogés. Quelques jours plus tard, ils furent transférés à la prison de Fresnes. Considérés comme espions, tous embarquèrent le 15 août en gare de Pantin à destination du camp de concentration de Buchenwald. Ils y restèrent pendant deux mois avant d’être transférés au Stalag Luft III à la fin octobre 1944 puis dans un autre camp. Malgré les privations et les souffrances extrêmes, tous survécurent à l’enfer jusqu’à leur libération au printemps 1945.

     La Cour de Justice d’Amiens condamna à mort les deux traitres, en septembre 1945 pour l’un et en novembre 1946 pour l’autre. Cependant la sentence suprême fut commuée en 1947, d’abord aux travaux forcés à perpétuité puis en 1951 à 20 ans d’emprisonnement. Bénéficiant de remises de peine, ils furent libérés quelques années plus tard et quittèrent la région.    
 

     Paul Grénaud était un industriel âgé de 40 ans. Il était aussi le maire de Puits-la-Vallée. Le 28 juin, il accueillit Louis Watts et Joseph Houlihan chez lui auprès de sa femme Jeanne et de leurs quatre jeunes enfants. Son activité de résistant avait débuté dans le Jura en novembre 1942 où il porta assistance à des prisonniers de guerre évadés, désireux de passer en zone non-occupée. Il s’installa ensuite à Puits-la-Vallée et poursuivit son action à compter du mois de mars 1944. Recruté par Henri Vincenot, il vint en aide à des réfractaires et à des agents recherchés. Juste avant l’arrivée de Louis Watts et de Joseph Houlihan, il s’était vu confié pendant trois semaines l’hébergement du F/O Louis Greenburgh (RCAF). Il le conduisit, peu avant la rafle, au château de Wavignies où Henri Vincenot souhaitait vérifier qu’il n’était pas un aviateur infiltré au service de l’ennemi. Louis Watts et Joseph Houlihan séjournèrent pendant cinq jours chez Paul Grénaud, jusqu’au 3 juillet 1944. Ce jour-là, les rafles opérées à Saint-Just-en-Chaussée et dans ses environs obligèrent Paul Grénaud à les déplacer par précaution à Maulers, à 5 kms de Puits-la-Vallée.

     Tout comme Jean Crouet, Henri Vincenot et sa femme Yvonne, Paul Grénaud était membre du réseau d’évasion Kummel. Ce réseau, créé par Patrick Hovelacque en février 1944 pour le compte de la “France Libre” basée à Londres, s’intégrait au sein du Bureau Central de Renseignements et d’Action (BCRA). En liaison avec le service de renseignements britanniques MI9/IS9, le réseau Kummel avait pour mission de récupérer des aviateurs alliés et d’assurer leur rapatriement vers la Grande Bretagne. Dès le mois d’avril 1944, les aviateurs étaient collectés au nord de la région parisienne et convoyés vers la frontière espagnole, via Paris et Bordeaux. Après la périlleuse traversée des Pyrénées, la jonction avec les services britanniques était réalisée à Saint-Sébastien. Les aviateurs étaient ensuite conduits à l’ambassade britannique de Madrid. À compter de l’Opération Overlord, la prise en charge des aviateurs se limita uniquement à leurs hébergements, sans évacuation vers l’Espagne. On estime que 70 aviateurs ont été pris en charge par ce réseau. Plus de 130 agents ont participé aux missions de collectage, d’hébergement, d’habillement, de conception des faux papiers et de convoyage.

     Les mesures répressives allemandes obligèrent Paul Grénaud à quitter provisoirement le secteur. Il confia la garde de Joseph Houlihan et Louis Watts à son lieutenant Juste Desesquelles, alias “Lieutenant Roger”. La tension était maximale. Tous redoutaient de nouvelles rafles ou des dénonciations consécutives aux récentes arrestations. Les aviateurs devaient être évacués au plus vite. Juste Desesquelles avait pour instruction de se rendre à Grandvilliers auprès de Bruno Radziminski, membre du réseau Kummel, pour envisager leur transfert.

Desesquelles     Juste Desesquelles était âgé de 25 ans. Il était marié et père d’une petite fille de deux ans. Recherché par la Gestapo, il avait trouvé refuge auprès de Paul Grénaud au début de l’année 1944. Il s’occupait alors de la garde et du ravitaillement des réfractaires et des aviateurs alliés cachés dans la région, tâche qu’il accomplissait avec d’autant plus d’ardeur car il était lui-même passionné d’aviation et ancien élève-mécanicien de l’Armée de l’Air.

     Louis Watts et Joseph Houlihan séjournèrent quelques jours à Maulers, le temps pour Juste Desesquelles de prendre contact avec les agents du réseau de Grandvilliers et d’organiser leur convoyage. Selon Patrick Hovelacque, Juste Desesquelles convoya les aviateurs “à bicyclette malgré un grand danger”. Le trajet s’était vraisemblablement déroulé en plusieurs étapes intermédiaires. Dans une correspondance d’après-guerre adressée à Joseph Houlihan, Juste Desesquelles évoqua une halte à Le Saulchoy.

     Entré en Résistance dès 1941, Juste Desesquelles était à l’origine de plusieurs sabotages d’installations électriques et de véhicules allemands. Entraîneur d’hommes, il forma, de sa propre initiative, des groupes de Résistance sur Beauvais et ses environs. Tout d’abord agent de liaison, il devint chef de groupe à la fin de 1942. Traqué par la Gestapo, il fut recueilli par Paul Grénaud et prit une part active au sein du réseau d’évasion. En juillet 1944, il fut nommé Lieutenant FFI et mena avec son groupe, différentes opérations de sabotage de routes et de convois allemands dans le canton de Froissy. En dépit des surveillances accrues, il transporta à plusieurs reprises des armes et des munitions à l’approche des troupes alliées. Il participa avec ses hommes aux combats de la Libération et captura plusieurs soldats allemands le 31 août. Au rétablissement de l’Armée régulière, il poursuivit la lutte en rejoignant le 51e Régiment d’Infanterie de Beauvais puis réintégra l’Armée de l’Air au sein de la Première Armée française.

ReneLiebbe     A mi-chemin entre Maulers et Grandvilliers, Louis Watts, Joseph Houlihan et leur guide Juste Desesquelles trouvèrent refuge le 14 juillet 1944 chez René Liebbe, à Crèvecœur-le-Grand. Ils arrivaient dans une localité durement meurtrie par les bombardements allemands de juin 1940. René Liebbe avait 38 ans et vivait avec sa femme Lucette et leurs deux enfants : Bernard et Jean-Mary. Il travaillait à son compte en tant que mécanicien-garagiste, au “Garage Moderne” qui était attenant à son domicile. René Liebbe connaissait Juste Desesquelles depuis longtemps. Ce dernier était entré dans la Résistance organisée par son intermédiaire. Après avoir déposé les aviateurs, Juste repartit. Il vint les récupérer trois ou quatre jours plus tard.

     Ce nouveau lieu d’hébergement était peu conventionnel pour Louis Watts et Joseph Houlihan. Les fenêtres de leur chambre au rez-de-chaussée faisaient face à la rue. Il n’était pas rare pour les deux aviateurs d’apercevoir des Allemands venir au garage effectuer des réparations sur leurs véhicules. René Liebbe n’avait pas d’autre choix que d’accepter cette clientèle allemande et, sous couvert de réparations, procédait bien souvent à des sabotages dissimulés. De la même façon, bon nombre de voitures civiles avaient été mises hors d’état de fonctionnement par René Liebbe, à la demande de leurs propriétaires, afin d’éviter les réquisitions allemandes. Le “Garage Moderne” fournissait également les outils nécessaires aux sabotages.

     Cela faisait maintenant plus de deux mois que Louis Watts et Joseph Houlihan étaient sous la protection de la Résistance. Après trois jours passés à Crèvecœur-le-Grand, ils quittèrent René Liebbe et repartirent avec Juste Desesquelles pour Grandvilliers. Quelques jours plus tard, Juste Desesquelles lui confia de nouveau trois autres aviateurs du Commonwealth.

     Le 18 juillet 1944, Louis Watts et Joseph Houlihan arrivèrent à Grandvilliers au domicile de Bruno Radziminski. Tout comme Crèvecœur-le-Grand, Grandvilliers n’avait pas été épargnée par les bombardements de juin 1940. Bruno Radziminski vivait d’ailleurs dans un baraquement.

     Fait prisonnier à Dunkerque le 2 juin 1940, Bruno Radziminski avait été envoyé dans un camp de prisonniers en Allemagne. Etant d’origine polonaise (naturalisé Français en 1932), il fut désigné comme interprète franco-polonais et sabotait tous les ordres transmis par les officiers, à leur grand désespoir. Il s’occupa en outre avec beaucoup de dévouement à l’amélioration du sort de ses camarades en parvenant à obtenir du ravitaillement ou en transmettant des lettres malgré la censure. Simulant une maladie, il fut rapatrié en France en mai 1941. Il entra alors en Résistance avec ses camarades Florent Franckaert, Louis Girard et Edgard Tilloloy, participant à différentes actions de propagande antiallemande et de sabotage.

     À partir d’avril 1944, leur activité se spécialisa dans la récupération, le logement, le ravitaillement et le convoyage d’aviateurs alliés. Ils trouvèrent plusieurs hébergements dans les villages environnants et assurèrent quotidiennement leurs approvisionnements.

     Agé de 34 ans, Bruno Radziminski exerçait la profession de tailleur. Louis Watts and Joseph Houlihan étaient hébergés dans son salon d’essayage. Son activité professionnelle étant en suspens, les aviateurs ne risquaient pas d’être en contact avec d’éventuels clients. Bruno Radziminski se consacrait en effet à plein temps au sauvetage d’aviateurs alliés au sein du réseau Kummel.

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                                          Bruno Radziminski                                                        Grandvilliers - Bruno Radziminski et sa famille.

     Ce réseau permit également de dissimuler des soldats de nationalité polonaise ou russe, enrôlés de force dans l’Armée allemande, que Bruno Radziminski parvenait à faire déserter. Il hébergea lui-même 7 aviateurs dont Joseph Houlihan et Louis Watts. Tous furent convoyés par ses soins à La Garenne-Colombes, en région parisienne, et remis, pour cinq d’entre eux, à Ellen Walker. Le trajet d’une centaine de kilomètres vers la Garenne-Colombes était une étape très périlleuse de l’évasion de Louis Watts et Joseph Houlihan. Le convoyage en camionnette s’effectua cependant sans encombre.

     Après le Débarquement allié, Bruno Radziminski mena, en parallèle de sa filière d’évasion, des actions directes à l’encontre des convois allemands descendant du nord et se dirigeant vers le front de Normandie. Le 30 août 1944, il participa activement à la Libération de Grandvilliers. Informé de l’approche des chars alliés et ayant appris la fuite du chef de gare allemand, il occupa sa place et de ce fait réussit à mettre en déroute, par téléphone, tous les chefs de gare de la ligne Grandvilliers-Le Tréport, désorganisant ainsi le réseau allemand. Avec son groupe, ils prirent les armes et firent plusieurs prisonniers dans la localité.

     Bruno Radziminski était en relation avec André Rohmer, boulanger de profession et membre d’un réseau de renseignement à La Garenne-Colombes. Ce dernier était spécialisé dans le repérage et le placement d’aviateurs alliés auprès de différentes filières d’évasion (il revendiqua près de 140 contacts). Par l’intermédiaire d’un agent de liaison, les deux hommes décidèrent de confier Louis Watts et de Joseph Houlihan à Ellen Walker à la Garenne-Colombes. Le convoi arriva à destination le 21 juillet.

     Ellen Walker était âgée de 38 ans. Entrée en Résistance organisée par l’intermédiaire de Claude Jubert, fils du maire de la Garenne-Colombes, elle inscrivit son action dans l’hébergement d’aviateurs alliés et de réfractaires, dans la distribution de journaux clandestins et la remise de fausses cartes d’identité. Sujet britannique, elle était tenue de se présenter quotidiennement au poste de police. Elle entra alors en contact avec des agents sympathisants et collecta de précieuses informations relatives à des arrestations imminentes de la Gestapo. Bien qu’étroitement surveillée, Ellen Walker poursuivit son action en toute discrétion au service des aviateurs alliés.

     Louis Watts et Joseph Houlihan séjournèrent quelques jours avec Ellen Walker. Pendant ce temps, André Rohmer prit contact avec Charles Paris et l’avisa du placement temporaire des aviateurs. Charles Paris était un ancien dessinateur industriel de 38 ans. Il se consacrait désormais totalement au service du réseau Kummel dont il était l’un des responsables. A cette époque, il faisait face à de nombreuses difficultés liées à l’impossibilité d’évacuer vers Bordeaux les aviateurs hébergés en région parisienne. Les moyens de transport étant interrompus, il devait trouver des hébergements aux aviateurs qui continuaient d’affluer. Anticipant le risque d’une perquisition au domicile d’Ellen Walker, Louis Watts et Joseph Houlihan furent hébergés dans l’avenue Foch. Ellen Walker continua cependant à s’occuper d’eux avec la complicité d’Elisabeth Derrey et de Georges Mauger.

     Le 25 juillet, les Alliés réussissaient à percer les défenses allemandes en Normandie. Les divisions américaines s’y engouffrèrent et prirent à revers les Allemands qui subissaient de lourdes pertes, piégés dans la poche de Falaise. Face à cette poussée, les Allemands battaient en retraite. Pendant ce temps Charles Paris ne ménageait pas ses efforts pour nourrir la vingtaine d’hommes cachés en banlieue parisienne dont il avait la responsabilité. Cinq d’entre eux étaient logés à La Garenne-Colombes aux bons soins d’Ellen Walker et de Renée Derrey. Malgré les difficultés croissantes d’approvisionnement, elles pouvaient toutefois compter sur le boulanger Rohmer et le restaurateur Jean-François Lecoq dont l’établissement se situait à l’angle de la rue dans laquelle étaient hébergés Louis Watts et Joseph Houlihan.

     Depuis la mi-août, l’Armée américaine se rapprochait chaque jour un peu plus de Paris, provoquant une certaine effervescence parmi la population de la capitale et de sa banlieue. Le 19 août, c’était l’insurrection générale. Des combats de rue, à l’issue incertaine, s’engageaient entre les Allemands et les FFI parisiens. Charles Paris eut pour consigne de regrouper les aviateurs afin de procéder à leur évacuation. Il entreprit de faire passer l’expédition pour un convoi de la Croix-Rouge. Ce projet ne fut toutefois pas mis à exécution. Dans la soirée du 24 août, les cloches des églises de Paris sonnaient à toute volée à l’arrivée des premiers chars des armées libératrices. Le 25 août Paris était enfin libérée. C’était la liesse populaire. Ce moment intense fut immortalisé au carrefour du restaurant Lecoq où les aviateurs posaient pour une série de photos-souvenirs devant un véhicule GMC. Pour eux et pour le monde entier, un vent de liberté s’était levé.

Liberation 
 La Garenne-Colombes à la Libération, fin août 1944, devant le restaurant Le Coq.
Au 2e rang, Louis Watts est au centre. Joseph Houlihan est à droite à côté de Mme Le Coq. 

 

     Louis Watts et Joseph Houlihan furent par la suite conduits auprès du Capitaine Baker à l’Hôtel Windsor à Paris où l’IS9 avait installé son quartier général.

 

Mai 2017 : visite de la famille du S/Sgt Louis I. Watts.

Septembre 2019 : visite des familles Edge, Houlihan et Watts

 

 

            

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